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Corruption : distinction entre actes préparatoires non punissables, tentative et infraction consommée

18 juin 2019/dans Droit de fond, Notes et commentaires /par Alain Macaluso

Corruption : distinction entre actes préparatoires non punissables, tentative et infraction consommée

Les procédures en matière de corruption sont de plus en plus nombreuses. La relative complexité des normes suisses réprimant la corruption aux art. 322ter et suivants du Code pénal ne permet pas de discerner d’emblée et clairement les différents degrés de réalisation de l’infraction. Dans une affaire récente très médiatisée, le Ministère public genevois a notamment dû se prononcer sur la question du moment à partir duquel un comportement déterminé atteignait le stade des actes pénalement répréhensibles. L’affaire donne lieu à quelques réflexions destinées à tenter de distinguer les comportements punissables de ceux qui ne le sont pas.

Les art. 322ter et 322quater CP, comme l’art. 322septies CP, se déclinent en trois variantes (offrir, promettre ou octroyer un avantage indu pour la corruption active ; solliciter, se faire promettre ou accepter un avantage indu pour la corruption passive). Ces variantes sont « alternatives » et non pas toutes nécessaires à l’accomplissement de l’infraction. Elles résultent de la volonté du législateur de combattre la corruption en intervenant le plus tôt possible dans le processus corruptif. Cela permet ce faisant de « considérer que l’infraction est déjà consommée lors de l’offre ou de la promesse » – et leur pendant dans la corruption passive –, sans qu’il ne soit nécessaire que survienne l’octroi effectif de l’avantage indu, respectivement qu’il soit accepté.

La doctrine est quasi unanime, en considérant que l’infraction est consommée dès le moment où l’offre et la promesse (corruption active) de l’avantage indu, respectivement leur miroir (dans la corruption passive), parviennent au destinataire. Plus exactement, tel est le cas lorsqu’elles parviennent dans la sphère de connaissance de l’agent public, si bien que, en principe, celui qui l’a formulée n’est plus en mesure de revenir sur ses pas et qu’il n’appartient qu’au destinataire d’en prendre connaissance. À cet égard, peu importe que celui-ci en prenne effectivement connaissance ou non. La jurisprudence retient la même position, en considérant que l’offre « ist das Unterbreiten eines Angebots, wobei der Eingang beim Adressaten ausreicht », tandis que pour la promesse elle considère également « hier bedarf es nur des Eingangs beim Adressaten, nicht aber der Kenntnisnahme oder einer Reaktion » (TPF SK.2006.18 du 31.5.2007, c. 6.3 ).

À titre d’exemples, l’infraction de corruption active est consommée au moment où la lettre contenant l’offre ou la promesse arrive dans la boîte aux lettres physique de l’agent public ou sur son bureau, sur sa boîte aux lettres électronique en présence d’un courriel et sur son téléphone en présence d’un message électronique (SMS ou via une application de messagerie, telle que WhatsApp, Viber, iMessage, etc.).

Compte tenu du peu d’occurrences de la question de la tentative de corruption, celle-ci est peu étudiée par la doctrine et la jurisprudence est rare.

Toutefois, pour que la tentative puisse être retenue, un début d’exécution est exigé. Cela implique, d’une part, que le cap des actes préparatoires, non punissables en relation à la corruption, soit franchi, mais qu’en même temps l’infraction ne soit pas consommée d’autre part. Envisageable en théorie, une telle constellation l’est cependant moins en pratique.

Dans la corruption active, il peut exister un décalage entre le moment où l’offre ou la promesse est émise par le corrupteur et celui où elle parvient dans la sphère de connaissance de l’agent public, notamment lorsque l’acte s’opère entre absents. Par conséquent, il ne peut y avoir tentative de corruption que lorsque l’extraneus a transmis son offre ou sa promesse au destinataire, mais que celle-ci n’est pas encore entrée dans la sphère de connaissance de l’intraneus.

Ainsi, la doctrine image la chose en évoquant l’offre ou la promesse quittant les mains de celui qui la formule. Il en va de même, s’agissant du message électronique, au moment précis où l’auteur presse ou clique sur la touche « envoyer » d’un téléphone ou d’un ordinateur, car transmission et réception ne se confondent pas, quand bien même le laps de temps entre les deux peut être très court.

Enfin, relativement à l’octroi, l’auteur n’en est qu’au stade de la tentative entre le moment où il effectue un virement et le moment où celui-ci est exécuté et que le montant est crédité sur le compte du destinataire.

Parce que ces divers comportements devraient mener à la consommation de l’infraction sauf extraordinaire, seule la figure de la tentative achevée sous la forme du délit manqué entre en ligne de compte.

Tout ce qui précède le stade de la tentative relève des actes préparatoires, lesquels ne sont pas punissables en matière de corruption.

Tel serait ainsi le cas de celui qui prendrait des dispositions pour corrompre un agent public déterminé, par exemple en rédigeant une lettre demandant à un fonctionnaire des informations sur un processus décisionnel en cours et en l’insérant dans une enveloppe avec une somme d’argent, sans toutefois ni remettre l’enveloppe ni s’en dessaisir à destination du fonctionnaire. Plus en amont encore, l’intraneus n’en serait également qu’au stade des actes préparatoires, et donc dans les limites du licite, du moins du point de vue pénal, en songeant à contacter un extraneus lui ayant présenté une demande de permis de construire pour requérir de lui une somme d’argent en échange de l’octroi du permis sollicité. On demeure également au stade des actes préparatoires non punissables tant que l’on se trouve en présence de pures dispositions à corrompre, non encore concrétisées. Tel sera en particulier le cas aussi longtemps, par exemple, que l’agent public à corrompre n’aura pas même été identifié.

Dans une jurisprudence rendue en 1945 par l’Obergericht du canton de Berne, les juges ont ainsi considéré que la simple recherche de l’adresse de l’épouse d’un juge, dans le but de lui offrir un avantage indu pour que son mari viole ses devoirs de fonction, ne constitue pas encore une tentative de corruption, mais uniquement un acte préparatoire, lequel demeure impuni (ZBJV 81/1945 89).

De manière plus pertinente s’agissant d’une configuration relativement fréquente, la jurisprudence a également considéré que la constitution de « caisses noires » dans l’optique de verser des pots-de-vin dans le cadre de la corruption ne constitue pas un cas de tentative et relève donc des actes préparatoires non punissables (TF, 6B_1120/2015 du 29.9.2016, c. 1.3.2.).

En résumé, si les infractions en matière de corruption sont très rapidement consommées, il n’en demeure pas moins que tout comportement visant potentiellement des fins corruptives n’atteint pas nécessairement le seuil de la répression pénale. Ainsi, non seulement une tentative de corruption est-elle envisageable, mais encore, dans nombre de situations, les comportements découverts ne relèveront-ils que des actes préparatoires non punissables.

Proposition de citation : Alain Macaluso, Corruption : distinction entre actes préparatoires non punissables, tentative et infraction consommée in www.droitpenaldesaffaires.ch, du 18 juin 2019.

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